Le Tribunal, siégeant en formation élargie, a rendu ce jour sa décision dans une affaire relative à un recours tendant à l’annulation d’une décision ordonnant le recouvrement auprès du requérant des rémunérations, charges sociales et frais de déplacement d’un salarié dont le contrat a été résilié : cas TC contre Parlement (T-309/21).
L’affaire concerne le requérant, qui est membre du Parlement européen, et A, qui a conclu un contrat avec le Parlement en tant qu’assistant parlementaire accrédité à temps plein aux fins d’assister le requérant. Suite à la détérioration du travail de A, le requérant a exigé la résiliation du contrat de A. L’autorité responsable a tranché en faveur du demandeur et a informé A de cette résiliation. Par conséquent, A a introduit un recours en annulation contre cette décision devant le Tribunal, par lequel ce dernier a décidé que le motif invoqué par l’autorité responsable pour justifier la résiliation du contrat, à savoir la rupture du lien de confiance, n’apparaissait pas plausible. En effet, selon le Tribunal, l’autorité responsable a commis une erreur manifeste d’appréciation en faisant droit à la demande du requérant tendant à la résiliation du contrat de A pour ce motif.
En conséquence, le secrétaire général du Parlement a informé le requérant de l’ouverture d’une procédure en recouvrement des sommes indûment versées pour un montant total de 78 838,21 euros concernant l’assistance parlementaire fournie au requérant par l’APA. A cet égard, le directeur général des finances du Parlement a adressé au requérant la décision formelle (décision attaquée) et la note de débit correspondantes (note de débit attaquée), l’enjoignant de payer la somme susmentionnée. Suite à cette décision, le requérant a demandé à plusieurs reprises au Parlement de lui transmettre des informations complémentaires sur le recrutement et les travaux d’APA, dans le cadre de la présentation, dans un délai de deux mois, d’observations et de preuves visant à réfuter les conclusions du Parlement. Plus tard, le directeur général des finances informa le requérant que le délai qui lui avait été imparti pour présenter ses observations et ses preuves était expiré. Néanmoins, tout en constatant que le délai imparti à la requérante pour présenter ses observations était expiré, sans que la requérante ait sollicité une prorogation de ce délai, le directeur général des finances accorda à la requérante un délai de quinze jours pour présenter des observations complémentaires.
Par conséquent, après une vérification plus approfondie, le Secrétaire général a constaté que le Parlement avait suspendu le paiement de la rémunération d’APA à partir d’une date précise et, par conséquent, a décidé de retirer la décision attaquée ex tunc dans la mesure où elle a ordonné, le recouvrement de la somme de 27 644,47 euros au titre des rémunérations et charges sociales et de la somme de 439,20 euros au titre des frais de déplacement, soit une somme totale de 28 083,67 euros.
Compte tenu de ce qui précède et de la manière dont s’est déroulée la procédure entre la requérante et le Parlement, il a décidé d’introduire devant le Tribunal un recours tendant à l’annulation de la décision et de la note de débit attaquées.
Par le premier moyen, la requérante soutenait, notamment, que, en adoptant la décision attaquée, le Parlement avait violé le principe du respect d’un délai raisonnable consacré à l’article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux. À cet égard, le Tribunal, après avoir rappelé les règles modifiées, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice, a jugé que, si le Parlement avait respecté un tel principe, deux conditions devaient être remplies par lui, à savoir que la note de débit avait été envoyée immédiatement après la constatation de la créance et, en tout état de cause, dans les cinq ans suivant le moment où il a pu faire valoir sa créance. Dès lors, le Tribunal a constaté que le Parlement s’était bien conformé à ces exigences et a, dès lors, déclaré le premier moyen non fondé.
Conformément au deuxième moyen, le requérant soutenait que le Parlement avait violé son droit d’être entendu et son droit d’accès au dossier, consacrés par l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux, au motif qu’il s’était référé , dans la décision attaquée, aux conclusions de l’arrêt adopté précédemment par le Tribunal. En outre, le requérant a soutenu que le Parlement s’était fondé à tort sur l’article 9 du règlement (UE) 2018/1725 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions, organes et organismes de l’Union et sur le libre circulation de ces données, de lui refuser l’accès aux preuves qu’il avait demandées. À cet égard, il a estimé que le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas absolu et devrait être mis en balance avec d’autres droits fondamentaux, tels que, en l’espèce, le droit à l’information, conformément au principe de proportionnalité.
Le Tribunal, après avoir déclaré recevables les arguments du requérant, a jugé que les arguments du Parlement, selon lesquels il appartiendrait aux députés de conserver toute correspondance pendant une durée indéterminée, ne pouvaient être accueillis. En effet, la Cour a jugé que la possibilité de procéder à un archivage personnel de la correspondance ne peut avoir pour effet de dispenser le Parlement de l’obligation d’assurer la conservation de cette correspondance. Par ailleurs, s’agissant du Parlement s’appuyant sur l’article 9 du règlement 2018/1725, la Cour a fait droit à l’allégation du requérant selon laquelle le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas un droit absolu, mais doit être considéré au regard de sa fonction dans la société et équilibré, en tant que tel, à l’encontre d’autres droits fondamentaux, conformément au principe de proportionnalité. Dès lors, la Cour souligne qu’en l’espèce, le Parlement a omis de prendre en considération l’intérêt du requérant à avoir accès à certaines pièces du dossier personnel de l’APA afin de présenter utilement ses observations dans le cadre de la procédure de recouvrement contre lui.
En conclusion, le Tribunal annule la décision et la note de débit attaquées en ce qu’elles ordonnent le recouvrement partiel auprès de TC de la rémunération, des charges sociales et des frais de déplacement liés à l’emploi de A pour un montant de 50 754,54 euros, considérant que la décision ordonnant le paiement de la 28 083,67 euros ont été annulés par le Parlement ex tunc.
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